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L'automédication : contenu de la notion



" Appréhendée de façon générale comme le fait pour une personne de se soumettre à un traitement médicamenteux sans recours préalable à l’avis d’un médecin, l’automédication est l’expression extrême de l’autonomie du patient. "



Le médicament, tel que nous le connaissons aujourd’hui, n’a pas plus de cinq siècles d’existence, mais sa contribution dans la recherche du bien-être apparaît de plus en plus indispensable. Devenu presque indissociable, quasi inhérent à la vie de l’Homme, il est depuis quelques années au centre de nombreux débats de santé publique, eût égard aux multiples enjeux que comporte sa consommation.


Entre les risques sanitaires contrôlés mais certains et les bénéfices thérapeutiques et économiques importants, la consommation médicamenteuse est une question sensible qui révèle une certaine complexité largement intensifiée par le phénomène d’automédication.

Appréhendée de façon générale comme le fait pour une personne de se soumettre à un traitement médicamenteux sans recours préalable à l’avis d’un médecin, l’automédication est en effet l’expression extrême de l’autonomie du patient.


Toutefois, la question de l’automédication ne saurait se résumer à un débat manichéen « pour ou contre l’automédication ». D'une part, parce que la conception de ce phénomène a beaucoup évolué, à telle enseigne que « se soigner soi-même » n’est plus systématiquement considéré comme un danger ; c’est même souvent une démarche indispensable dans le parcours de soins. D'autre part, dans un contexte où l'accès aux soins relève encore du parcours du combattant, le recours à l'armoire à pharmacie familiale ou autres substances est parfois le choix qui s'impose dans l'immédiat.



Qu'est-ce que l’automédication ?

Etymologiquement, le terme “automédication” est constitué des particules « auto » qui signifie soi-même et « medicatio » qui renvoie à l’emploi d’un remède. Ainsi, l'automédication désigne le fait d'utiliser pour soi-même un remède. Mais il s'agit là d'une définition trop simpliste qui ne permet pas d'appréhender tous les contours de cette notion.


Or, il n’existe aucune définition juridique unique de l’automédication. Un constat qui peut être interprété de deux manières. D’un côté, il peut laisser penser que le législateur, conscient du large champ que couvre cette notion, n’a pas souhaité la circonscrire au risque de porter atteinte à la liberté des usagers de santé. Mais d'un autre côté, le vide juridique peut avoir une connotation péjorative en ce qu'il sous-entend une forme de désordre, un manque, un risque face à un comportement humain révélateur d’un « besoin de droit »[1].


Après une première tentative de définition jugée trop imprécise, L'OMS a finalement préféré à la notion d'automédication celle d'automédication responsable qui, selon elle, « consiste pour les individus à soigner leurs maladies grâce à des médicaments autorisés, sûrs et efficaces dans les conditions d’utilisation indiquées ». Une définition qui exclue d'emblée du champ de l'automédication au sens de l'OMS, les produits n'ayant pas fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché, y compris donc les médicaments traditionnels conçus et développés par les tradipraticiens.


Mais cette définition, reprise et complétée par la plupart des acteurs de santé dans le monde, est loin d'être satisfaisante. En effet, elle ne tient pas compte du phénomène dans sa globalité. Elle ne dit pas ce qu'est l'automédication, mais plutôt ce qu'elle devrait être. Il s'agit donc bien plus d'une recommandation que d'une véritable définition de la notion.


Néanmoins, nous appuyant sur les différents critères mis en évidence au fil des tentatives de définition, on retiendra que l'automédication désigne de façon générale le fait pour un individu de consommer, de sa propre initiative ou de celle d'un proche (automédication de l'enfant), et sans un avis médical préalable, un médicament qu'il avait déjà en sa possession ou qu’il s'est procuré à cet effet dans une pharmacie ou auprès d’un autre individu.



Les formes d’automédication

La notion d'automédication renvoie en réalité à plusieurs comportements ou attitudes que l’on peut regrouper en trois catégories. On parle notamment des trois schémas thérapeutiques ou degrés d’automédication : l’automédication primaire, l’automédication secondaire et l’automédication tertiaire.



  • L’automédication primaire

C’est le schéma classique d’automédication. Au départ, il y a une souffrance ressentie par un individu et qui va motiver le recours à un dispositif médicamenteux. Il y a généralement dans ce contexte un autodiagnostic, c'est-à-dire que l'individu va lui-même, à partir de ses symptômes, préjuger de la médicalisation de son état. Trois comportements d'accès aux soins peuvent alors être observés : soit l’individu va se fonder sur sa propre expérience et chercher dans son armoire à pharmacie le médicament qui selon lui convient ; soit il va se tourner vers son entourage ou internet pour obtenir des conseils ; soit encore, c’est auprès de son pharmacien qu’il ira demander conseil.



  • L’automédication secondaire

Dans ce schéma, l’individu est un patient qui souffre d’un mal récurrent pour lequel il a déjà consulté un médecin qui, à cet effet, lui a donc délivré une ordonnance. Il y a automédication dès lors que, plus tard, cet individu se réfère à nouveau à cette même ordonnance pour se soigner sans repasser par la case "consultation". Les Anglo-saxons parlent de « remedication ».



  • L’automédication tertiaire ou éducation thérapeutique

Lorsque le patient est atteint d’une maladie chronique lourde de type diabète ou asthme, il va être amené à gérer en toute autonomie les aspects aigus de sa pathologie en suivant des schémas thérapeutiques qui lui permettent d’utiliser des médicaments dont il aura acquis la maîtrise grâce à une éducation thérapeutique (ETP) délivrée par son médecin.

L’ETP n’est une pratique récente, elle existe depuis une cinquantaine d’années, mais c’est seulement en 1996 que l'OMS Europe va la reconnaître en indiquant que « l'ETP devrait être systématiquement intégrée dans les soins délivrés aux personnes souffrant de maladie chronique. ».







 

[1] Le « vide juridique » et le « besoin de loi ». pour un recours à l’hypothèse du non-droit, Anne-Marie Ho Dinh, L'Année sociologique 2007/2 (Vol. 57), p.320.

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