[COVID-19] L'Etat peut-il m'obliger à me faire vacciner ?
- Tania ONDO
- 27 déc. 2020
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 10 janv. 2021
" L'état d'urgence sanitaire n'a pas vocation à modifier la législation en vigueur en matière de vaccination. Il ne peut en aucun cas justifier la violation des droits du patient. "

Avant même leur mise au point, les vaccins anti-COVID suscitaient déjà une grande défiance au sein des populations africaines. Une défiance en partie nourrie par les diverses théories du complot qui se sont librement propagées sur les réseaux sociaux. D'un autre côté, la rapidité avec laquelle ils ont été élaborés n'a pas manqué de surprendre. En effet, au début de la crise, soit au premier trimestre de l'année 2020, les scientifiques évoquaient une attente d'au moins 18 mois avant l'introduction d'un vaccin efficace. Or, l'année 2020 n'est pas encore achevée que déjà, non pas un, mais plusieurs vaccins avec des taux d'efficacité impressionnants sont mis sur le marché et des campagnes de vaccination sont lancées dans certains pays occidentaux.
Au Gabon, alors même que le taux de positivité demeure en deçà de 1% depuis plusieurs mois (voir les données statistiques)[1], les autorités sanitaires envisagent elles aussi la mise en œuvre d'un plan national de vaccination (même si selon l'OMS, << l’Afrique est loin d’être prête à ce qui sera la plus grande campagne de vaccination du continent. >>[2]). Une ambition qui est loin de faire l'unanimité et qui, au contraire, engendre une nouvelle inquiétude, à savoir l'éventualité d'une vaccination obligatoire.
Il n'y a pas d'obligation vaccinale au Gabon
Parce qu'elle constitue un << moyen de prévention efficace >> dans la lutte contre les maladies infectieuses, la vaccination est une part non négligeable de notre système de santé, bien qu'elle demeure à ce jour dépourvue d'un réel cadre juridique. Au Gabon, c'est l'Ordonnance n°001/95 du 14 janvier 1995 portant orientation de la politique de la santé en République Gabonaise [3] qui est censée fixer les principaux axes de la politique vaccinale de l'Etat. S'il ne prévoit en aucune de ses dispositions une obligation vaccinale opposable à tous, le texte en appelle toutefois à la responsabilité des parents vis-à-vis de leurs enfants. C'est sans doute à ce titre que la scolarisation en maternelle est généralement conditionnée à la présentation d'un carnet de vaccination à jour. Autrement dit, vous avez le droit de ne pas faire vacciner votre jeune enfant. En contrepartie, tout chef d'établissement aura le droit de refuser d'inscrire ce dernier. Par ailleurs, si votre décision ne vous expose à aucune sanction judiciaire immédiate, votre enfant pourrait, en toute légitimité, vous poursuivre plus tard pour défaut de soins.
<< Les soins à donner aux enfants constituent pour les parents un droit naturel et un devoir qu'ils exercent sous la surveillance et avec l'aide de l'Etat et des collectivités publiques. >> (Ordonnance n°001/95 du 14 janvier 1995, article 4)
En définitive, la vaccination n'est pas obligatoire, mais fortement recommandée dans l'intérêt de la communauté. Il appartient donc à l'Etat, qui ne peut passer outre votre droit de refuser les soins qui vous sont proposés, de mettre tout en œuvre pour vous convaincre de la nécessité de vous faire vacciner.
L'état d'urgence sanitaire peut-il justifier une obligation vaccinale ?
L'état d'urgence sanitaire n'a pas vocation à modifier la législation en vigueur en matière de vaccination. Il ne peut en aucun cas justifier la violation des droits du patient. On peut toutefois craindre une volonté des autorités de multiplier des mesures restrictives à l'encontre de ceux qui auront fait le choix de ne pas se faire vacciner. Ainsi, votre liberté d'aller et venir pourrait bien à terme dépendre de votre statut vaccinal. Ce qui reviendrait ni plus ni moins à la mise en œuvre d'une << obligation vaccinale déguisée >>.
[3] ratifiée par la loi n°12/95 du 16 juin 1995
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