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Qu'est-ce que le consentement libre et éclairé en droit médical ?

Dernière mise à jour : 22 avr. 2021



" De façon générale, l’obligation d’information a pour objectif de rééquilibrer la relation entre le professionnel de santé et le patient profane. "



Alors que le lancement d'une campagne de vaccination anti-covid se profile au Gabon, l'heure est à la pédagogie. En effet, les autorités ont d'ores et déjà précisé que la vaccination se ferait sur la base du volontariat, ajoutant qu'une pharmacovigilance serait mise en place et que le consentement des candidats au vaccin devra être éclairé. Mais le consentement éclairé, qu'est-ce que c'est ?

La réponse à cette question nécessite de s'attarder au préalable sur la notion même de « consentement » et tout ce qu'elle recouvre.



LA NOTION DE CONSENTEMENT

Le code civil ancien ne dit pas ce qu’est le consentement. Néanmoins, par un raisonnement a contrario de la lettre de son article 1109, il peut être défini comme « l’expression de la volonté de la personne lorsque celle-ci n’a pas été exprimée par erreur ou n’est pas issue de la contrainte de la personne ou d’une tromperie »[1].


Appliqué au domaine médical, le principe du consentement s’inscrit dans le strict respect de celui de l’inviolabilité du corps humain. Il est formellement consacré par le code de Nuremberg[2] et repris par l'Ordonnance du 23 février 2018 portant organisation et gouvernance des structures sanitaires en République Gabonaise en son article 13 qui dispose : « Un acte médical ne peut être pratiqué sur le patient sans son consentement ».


Il en résulte que le consentement constitue la clé de voûte de la relation médecin/patient, laquelle repose sur un principe de libre choix de son médecin. Toutefois, le consentement thérapeutique est très particulier car contrairement au consentement de droit commun, il n'est pas donné une fois pour toute : il y a donc un dualisme des consentements.




1. La liberté de choisir son médecin


L’autonomie de la volonté suppose l’absence de toute contrainte. Ce qui signifie qu'on ne saurait en principe imposer à un patient de consulter tel médecin en particulier. Cette prérogative du patient est toutefois assortie d'exceptions.


  • Le contenu de la règle du libre choix

Considéré comme le premier marqueur de l’autonomie de la volonté du malade, le principe du libre choix de son médecin figure dans le code de déontologie médicale ancien en son article 16. Il est également repris par l'Ordonnance du 23 février 2018 qui dispose en son article 11 que « le patient a le libre choix de structure sanitaire et de son praticien ».


En France, ce principe a très tôt été affirmé comme étant essentiel et a suscité la promotion d’une véritable politique de transparence en matière d’accessibilité aux soins. C’est notamment dans cette optique que les caisses de sécurité sociale se sont engagées à toujours mettre à disposition des usagers de santé, les informations relatives à la situation des praticiens locaux et aux tarifs pratiqués.


Au Gabon, l'article 12 de l'Ordonnance précitée prévoit que « les praticiens et personnels paramédicaux des structures sanitaires communiquent les informations accessibles aux patients ou aux personnes qui les accompagnent ». Cette information est gratuite et incombe à tous les praticiens, en exercice libéral ou salarié, et à tous les établissements de santé publics et privés. Toutefois, dans la pratique, la transparence n'est pas toujours tout à fait de mise, une défaillance qui, immanquablement, contribue à l'émergence d'un phénomène de « marchandisation des soins de santé »[3] comme en témoigne la multiplication des affaires impliquant des médecins poursuivis pour délit de concussion [4].


Le principe du libre choix n’est cependant pas absolu. Il est particulièrement remis en cause en cas d'urgence médicale, assortie d'une impossibilité de recueillir le consentement du malade. Néanmoins, dès lors que son état le lui permet, ce dernier peut choisir de confier son suivi thérapeutique à un autre médecin.


Le mécanisme du médecin traitant constitue également une atténuation du principe du libre choix, même s'il ne constitue pas, comme en France, une véritable obligation légale dont la méconnaissance serait sanctionnée.


  • Une garantie légale du lien de confiance

Le recours aux soins est en premier lieu suscité par le sentiment de vulnérabilité que ressent une personne à un moment donné. De cette vulnérabilité naît le besoin d’être écouté, épaulé, voire sauvé.


Du fait de sa maladie, le malade se trouve dans un état de stress profond qui le place incontestablement dans une position de dépendance vis-à-vis du praticien vers lequel il se tournera pour tenter de recouvrer sa santé.


Dans un tel contexte, le principe du libre choix s'inscrit dans le strict respect de la dignité humaine. Le patient choisira son médecin en fonction soit de la confiance que lui inspire la compétence réelle ou supposée de ce dernier soit de la confiance qu’il lui inspire en tant que personne. En effet, comme l’affirmait le professeur Louis Portes , « il n’y a pas de médecine sans confiance ».




2. Le dualisme des consentements


De manière générale, le consentement initial que les parties s’échangent au moment de la formation d'un contrat classique est définitif et ne peut a posteriori être remis en cause que si l’existence d’un vice a été révélée. En droit médical, le consentement n’est pas donné une fois pour toutes. En consentant à la relation médicale, le patient n’accepte en réalité que le principe du soin. Son consentement doit donc systématiquement être recherché pour chaque acte médical envisagé : on parle notamment d’assentiment à l’acte médical.


Il faut donc distinguer le consentement général à la relation de soin du consentement spécial requis pour les actes médicaux[5]. Si le premier permet la formation du contrat médical, le second a pour objet, non pas de créer un nouveau contrat, mais simplement d’assurer l’exécution et la continuité du contrat initial.


Le recours à cette notion d’assentiment semble résulter avant tout de la volonté de corriger « une lacune de l’éthique ». En effet, face à des patients se trouvant dans l’impossibilité de donner un consentement libre et éclairé en raison de l’altération de leur conscience ou d’une affection démentielle de type Alzheimer, il a fallu faire appel à une notion plus à même de donner à ces derniers « un espace d’expression reconnu », car mieux adaptée à la variabilité de l’incapacité[6].


Pour Gérard Méméteau, l’émergence du principe d’assentiment est jurisprudentielle et bien plus ancienne qu'on le pense. En France, elle remonte à un arrêt de la Cour impériale de Paris datant du 30 Juin 1853, un jugement du tribunal correctionnel de Lyon du 15 Décembre 1859, puis des décisions ultérieures jusqu’au célèbre arrêt « Teyssier » du 28 Janvier 1942 confirmé par l’arrêt du 29 Mai 1951[7].

Selon l’arrêt de 1942, le médecin qui oublie de recueillir l’assentiment d’un patient commet une faute « si grave que, à la charge du praticien public, elle est une faute personnelle ».


Toutefois, l’exigence de l’assentiment n'a pas encore été expressément reprise par le législateur gabonais bien qu'elle semble découler de l'esprit de la lettre de l'article 13 de l'Ordonnance du 23 février 2018 déjà cité.


En définitive, la nécessité de l’assentiment à l’acte médical répond à l’exigence d’une volonté certaine du patient et est, à ce titre, fondé sur le principe d’inviolabilité du corps humain. En ce sens, il dit plus que le consentement, car « on peut donner son consentement à une chose sans y donner son assentiment »[8].



LE CONSENTEMENT ECLAIRE

Parallèlement à l’exigence d’un consentement libre, le législateur exige que le consentement soit éclairé : c’est le principe de l’information.


De façon générale, l’obligation d’information a pour objectif de rééquilibrer la relation entre le professionnel de santé et le patient profane. L’information délivrée par le médecin va permettre au patient de prendre une décision éclairée, c'est-à-dire en connaissance de cause. C'est pourquoi le droit oblige les praticiens à délivrer une information qui soit à la fois accessible et loyale. L'information porte essentiellement sur l'état de santé réel du patient, les traitements et les éventuelles investigations que nécessite son état et les risques encourus.


Par ailleurs, de même qu’il existe un dualisme des consentements, l'obligation d’information est elle aussi renouvelable. Elle intervient d'abord lors de la formation du contrat médical et constitue alors une obligation précontractuelle. Elle intervient à nouveau au cours de l’exécution du contrat médical, préalablement à tout acte médical.

Enfin, en matière de responsabilité médicale, la charge de la preuve de la transmission de l'information est entièrement supportée par le praticien. Autrement dit, c'est à lui de prouver qu'il a bel et bien respecté son obligation d'information. Cette preuve peut être rapportée par tous moyens.








 

[1] Thèse, Le consentement du patient en droit de la santé, p.5 [2] Article 1er du code de Nuremberg : « Il est absolument nécessaire d’obtenir le consentement volontaire du malade avant tout traitement » [3]OMS, Rapport sur la santé dans le monde, 2008 : les soins de santé primaires maintenant plus que jamais, Genève, 2008, p.14. [4] « Le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, de recevoir, exiger, ou ordonner de percevoir à titre de droits ou contributions, impôts ou taxes publics, une somme qu’elle sait ne pas être due, ou excéder ce qui est dû » Article 501 du Code pénal gabonais. [5] B. Moron-Puech, Contrat ou acte juridique ? : Étude à partir de la relation médicale, sous la dir. de D. Fenouillet, Thèse de droit, Université Panthéon-Assas (Paris II), 4 avr. 2016, url : http://www.theses. fr/s50212 (visité le 22/09/2015), no 78, p. 53. [6] De brefs moments de lucidité chez les patients d’Alzeihmer [7] la-loi-peut-elle-controler-la-validite-du-consentement, Gérard Méméteau, 2012 [8] Bonnaire, 1835.

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